Quelques visages de la vie monastique

Contrairement à une idée répandue, un monastère n'abrite pas seulement des moines…
Il forme une véritable petite communauté où chacun occupe un rôle bien défini.

briteLes moines et les moniales sont des religieux qui ont choisi de vivre à l’écart du monde pour dédier leur vie à Dieu. Ils forment une communauté vivant sous la même règle, notamment celle de saint Benoît, qui partage la vie monastique entre travail (manuel ou intellectuel), lecture de la Bible (lectio divina) et prière communautaire (Opus Dei « l’œuvre de Dieu ») (1).

Cette communauté est administrée par un abbé, du syriaque abba désignant « père ». Il s’agit d’un moine généralement élu à vie par la communauté pour en être le supérieur. À la fin du Moyen Âge, il peut être désigné par le pape ou par le roi : il devient un abbé commendataire (2). On le distingue surtout par sa crosse.

L’abbé Pierre le Vénérable s'adresse à un groupe de moines clunisiens ; sainte Eugénie, abbesse, entourée de ses moniales

D’autres individus circulaient et participaient à la vie quotidienne des monastères :

o Les novices : candidats à la vie religieuse, n’ayant pas prononcé leur vœux, soumis à un temps d’apprentissage dans la communauté qu’ils souhaitent rejoindre (3).

o Les oblats : au sens strict, le terme désigne celui « qui est offert » (oblatus). Il s’agit des enfants offerts par leur famille au monastère afin qu’ils reçoivent une éducation et deviennent moines, en échange de biens matériels.

Père offrant son fils à un monastère

o Les convers : du latin conversus, « convertis », ils peuvent désigner des religieux ou des laïcs entrés au monastère à l’âge adulte faisant profession de foi. Ils assurent les tâches matérielles de la vie communautaire et peuvent prendre part aux offices (chants et prières avec les moines).
Cependant, ils ne deviennent pas clercs (c’est-à-dire qu’ils ne sont pas ordonnés prêtres) (4).

POUR LA PETITE HISTOIRE : à partir de la réforme grégorienne (fin du XIe s.), un certain nombre de grands aristocrates quittent leur vie séculière pour prendre l’habit monastique. Cluny attire alors de nombreux hommes et Notre-Dame de Marcigny, premier monastère féminin clunisien, devient le lieu privilégié des femmes. Parfois même, ce sont des couples entiers qui se séparent pour rejoindre la vie du cloître…
Ces conversions sont telles que le pape Grégoire VII reproche à l’abbé de Cluny de mettre en danger l’Église, qui n’est plus protégée par tous ces aristocrates devenus moines !

Prise de l'habit monastique

Laura Attardo
Chargée de mission scientifique - Clunypedia
Fédération Européenne des Sites Clunisiens
Doctorante à l'Université Paul-Valéry de Montpellier
Les moines de Cluny et l’image : un discours ecclésiologique à travers les manuscrits enluminés clunisiens (Xe-XIIIe siècle)
clunypedia@sitesclunisiens.org

Notes
(1) La règle de saint Benoit : BORIAS A., SCHMITZ P., (trad.), Règle de saint Benoit, Le Coudray Macouard, 2019 [en ligne : La Règle de saint Benoît].
(2) LOCATELLI R., « Abbé », in GAUVARD C., DE LIBERA A., ZINK M. (dir.), Dictionnaire du Moyen Âge, Paris, 2004 (2ème éd.), p. 1.
(3) « Lexique historique. Novice » in BERTRAND P., DUMEZIL B., HEL ARY X. et et alii (dir.), Pouvoir, Église et société dans les royaumes de France, de Bourgogne et de Germanie aux Xe et XIe siècles (888 - vers 1110), Paris, 2008, p. 284.
(4) LEMAITRE J. -P., « Convers », in Dictionnaire du Moyen Âge, Paris, 2004 (2ème éd.), p. 341 ; DUBOIS J., « Convers », in Encyclopedia Universalis [en ligne : CONVERS - Encyclopédie Universalis].
(5) LOCATELLI R., « Oblat », in Dictionnaire du Moyen Âge, Paris, 2004 (2ème éd.), p. 1013-1014.

Illustrations
Fig. 1 : L’abbé Pierre le Vénérable s'adresse à un groupe de moines clunisiens. Paris, BnF, Latin 17716 (début XIIIe s.), f. 25r ; Sainte Eugénie, abbesse, entourée de ses moniales, Paris. Français 51, f. 3.
Fig. 2 : Père offrant son fils à un monastère. Paris. Bibliothèque Mazarine, Ms 1291, XIIIe-XIVe s., f. 85.
Fig. 3 : Prise de l'habit monastique. Paris, Bibliothèque Sainte-Geneviève, Ms. 143, XIVe s, f. 53.